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Numéro 6 - rive éditoriale - janvier 2006

dr Bénédicte Halba, présidente fondatrice de l'iriv, co-fondatrice des rives de l'iriv

Mobilis in mobile

Chaque année 7,2% des citoyens européens changent de lieu de résidence. 15% justifient ce changement par des raisons professionnelles (1). Aux États-Unis, le taux annuel de mobilité est de 16,2%, dont 17% pour le travail (2).

Si l'on consulte le Journal Officiel des associations et des fondations (3), les changements d'adresse chaque année sont nombreux. En effet, le local est un problème crucial pour toutes les associations, c'est la première demande faite auprès des communes ou des autres collectivités. Les structures naissantes commencent par " être abritées " par d'autres associations ou domiciliées chez un membre du bureau (souvent le président). Elles attendent d'avoir pérennisé leurs activités pour dédier une part de leur budget à un loyer. Ce poste est aussi le premier touché en cas de difficultés économiques.

Plus de 38% de la population active européenne n'a pas changé d'employeur depuis plus de 10 ans (taux d'ancienneté au sein d'un même emploi). Ce taux moyen est de 10,6 années en Europe -contre 6,7 années aux Etats-Unis (4).

Les bénévoles sont beaucoup plus mobiles. Chaque année, les associations voient un tiers ou deux-tiers de leurs effectifs se renouveler. Un bénévole s'engage en moyenne trois années au sein d'une même structure. Ce qui explique que le recrutement soit devenu un problème crucial pour les associations. Le bouche à oreille et le réseau personnel des bénévoles ne suffisent plus. De plus en plus de structures publient des annonces dans la presse, locale ou nationale selon leur champ d'intervention. Pour une action d'accompagnement à la scolarité, la Gazette du quartier ou de l'arrondissement a plus d'impact. Pour une manifestation sportive d'envergure, Jeux Olympiques ou Coupe du Monde de football, les échelons régional et national sont plus pertinents.

D'après une étude menée en 2003 sur la population active 8,2% des travailleurs au sein de l'Union Européenne avaient changé de profession au cours de la dernière année (taux de mobilité professionnelle annuelle) (5).

Les bénévoles ont la chance de pouvoir exercer plusieurs métiers au sein de leur association. Leurs missions évoluent en fonction du temps qu'ils y consacrent, des compétences qu'ils développent mais aussi de leur intérêt pour le projet. Ils sont polyvalents par choix ou par nécessité. Ainsi un bénévole recruté sur une mission d'accueil et d'écoute, peut ultérieurement développer le site Internet de l'association ou organiser l'Assemblée générale. Les associations ne savent pas toujours utiliser toutes les compétences de leurs bénévoles par manque de temps mais aussi par parti pris : une véritable " politique des ressources humaines " rappellerait le monde de l'entreprise dont elles voudraient se démarquer. Pourtant, les associations risquent de perdre leur bénévole, faute de valoriser " leur capital humain ". (6)

L'objet du projet européen initié par l'iriv " Valoriser les acquis d'une expérience bénévole " est de proposer une grille d'analyse sur ces compétences bénévoles. L'enjeu est double. Pour les bénévoles, ce bilan permettra de mieux les utiliser au sein de leur association, dans une autre structure associative ou sur le marché du travail. Pour les associations, les missions proposées seront associées à des compétences qui valoriseront leurs bénévoles actuels et futurs.

Mobilité et polyvalence sont devenus les mots clés de toutes les politiques d'emploi proposées à l'échelon européen ou national. Il est étrange de constater qu'ils sont synonymes de versatilité et d'amateurisme dans le monde associatif où ils sont perçus comme des handicaps et non comme des points forts.

Mobilis in mobile ainsi Jules Verne a-t-il défini le sous-marin du Capitaine Nemo, le Nautilus, dans Vingt mille lieux sous les mers. Tels des sous-marins dans l'océan, les bénévoles évoluent dans le monde changeant des associations. Pourquoi ne pas faire de cette mobilité une force et non une faiblesse ?

Sources :

(1) Site de la commission : http://europa.eu.int/comm/employment_social/workersmobility2006
(2) Département américain du travail, Bureau des affaires internationales, Labour markets in the 21st Century, conférence conjointe Etats-Unis - Union européenne , septembre 2002
 (3) Ce journal recense les créations, les dissolutions mais aussi les modifications liées à l'objet et au siège social
(4) Centre for European Policy Studies, A New European Agenda for Labour Mobility, avril 2004.
 (5) Étude d'Eurostat sur La population active au sein de l'U.E., 2004 (6)Projet accessible sur le site : www.eEuropeassociations.net

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