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Numéro 6 - rive spirituelle - janvier 2006

Abbé Régis de Saint-Rémy, prêtre

Fidélité et adversité

Le mot vient du latin fidelitas, dérivé de fides qui veut dire " foi " Il a aussi donné fidelis, qui se traduit par " fidèle ", " rempli de foi ", " attaché à la foi ". Seul un être vivant peut être fidèle, car cette vertu demande un effort sur soi-même, de la constance, de la régularité. La fidélité est une vertu exigeante, le mot ne fait que modérément partie du vocabulaire usuel.   


Dans l'Ancien Testament (1), seul Dieu est véritablement fidèle, car il dispense la Foi. Aussi, durant sa longue quête, le peuple hébreu essaya-t-il de garder ou de retrouver cette fidélité à la parole donnée. Il connut d'abord un exode de trois cent cinquante ans en Egypte, sous des pharaons qui pratiquaient le polythéisme - à l'exception d'un seul. Cette période sombre se termina par un temps de persécution, parce que les Hébreux voulaient rester fidèles à leur Foi. L'arrivée en Terre Promise ne fut pas plus facile : quarante ans au désert suivis d'innombrables combats, autant spirituels que temporels.   

La situation aurait pu se stabiliser. Mais le peuple hébreu, déchiré par des luttes internes et incapable de garder efficacement ses frontières, se retrouva à nouveau déporté à Babylone, sous le coup d'une invasion étrangère. Cette fois, la captivité fut plus douce mais les deux problèmes réapparaissaient, à l'image de ce qui s'était passé en Egypte, les dieux de Babylone s'opposaient au Dieu unique, et les Hébreux exilés n'étaient plus en Terre Promise.   

D'autres guerres eurent encore lieu, d'autres faux dieux se manifestèrent. Dès qu'une opposition était jugulée, il en apparaissait une autre…. Le phoenix, symbole du mal, renaissait toujours de ses cendres. Il fallait réagir à la fois contre les ennemis de l'extérieur et ceux de l'intérieur. Les prophètes, chargés de rétablir la vérité, risquaient souvent leur vie.   

Pour les hommes du XXe siècle, qui sont les ennemis de l'extérieur ? Les changements (les déménagements par exemple !), les oppositions auxquelles il faut faire face, les obstacles à surmonter, les tracas quotidiens mangeurs de temps et d'énergie… Les ennemis de l'intérieur sont plus subtils parce que plus encombrants et plus intimes. Il faut lutter autant contre la faiblesse humaine que contre la malice, car notre principal ennemi c'est nous-mêmes.   

La prudence permet de rester fidèle. Elle n'est pas synonyme de crainte, ne se réduit pas à ce qu'il convient de faire ou non : elle organise notre vie spéculative et pratique, qui règle les matières intellectuelles (accessibles à tout le monde) et les autres. Elle sépare les bonnes choses des mauvaises, d'où l'expression " jugement prudentiel ". Cette grande vertu a marqué l'histoire. Au XIIe siècle, alors que le pape venait de mourir et qu'on lui cherchait un successeur, trois candidats furent entendus : un saint, un savant et un prudent. Sur les conseils d'un docte personnage - Bernard de Clairvaux -, on finit par choisir le… prudent. Vertu positive par excellence qui prévoit l'imprévisible.   

Le peuple hébreu était arrivé à la même conclusion : S'il désirait rester fidèle face aux difficultés, il lui fallait être prudent et organiser sa vie en conséquence. Alors, il prit soin de marquer régulièrement le temps par des fêtes liturgiques, signes de son alliance avec Dieu. C'est ainsi qu'il put rituellement commémorer tel événement ou tel mystère sacré, parce qu'il avait auparavant établi ce qui était pour lui des symboles de fidélité (2).  



(1) C'est aussi le cas dans le Nouveau Testament. 
(2) le symbole constitue, beaucoup plus qu'une image, un signe de reconnaissance.   



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