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Numéro 7 - rive spirituelle - mai 2006

Abbé Régis de Saint-Rémy, prêtre

Fraternité spirituelle

Le mot fraternité est souvent utilisé au sens spirituel. Dans cet usage, l'intention est de rendre la réalité spirituelle plus accessible : élever les rapports humains, qui sont naturels, à des rapports transcendés, leur apportera une dimension surnaturelle.   


On sait qu'une fraternité, au sens propre, représente le lien sanguin unissant deux frères issus d'un même père. Au sens spirituel, le mot exprime le lien unissant tous ceux qui croient au même Dieu, ils deviennent alors ses fils. On parlera donc de filiation divine, beaucoup plus forte que la simple adhésion à une idéologie ou à tout système de pensée.   

Illustrons cette élévation des choses naturelles et leur progression vers des choses de plus en plus spirituelles. Nous sommes composés d'un corps et d'une âme, elle-même divisée en une partie inférieure (les appétits sensibles appelés les passions) et une partie supérieure (les aspirations divines). Cette hiérarchisation de l'âme suppose une subordination des choses sensibles aux choses spirituelles : ces dernières sont toutes deux complémentaires et nécessairement dépendantes les unes des autres.   

Une fraternité spirituelle est exigeante. Elle n'est pas un simple concept mais, s'appliquant aux hommes eux-mêmes, elle est morale au sens premier du mot (1). L'exemple le plus extrême est l'histoire d'Abel et de Caïn. Ce dernier tue son frère par jalousie, et dans la Bible le meurtre est placé immédiatement après le péché originel. L'ordre de cette narration exprime que la jalousie est la première et la plus importante des atteintes à la fraternité, le péché originel étant, lui, une atteinte au Législateur Suprême.   

Toutes les mésententes, qui par essence sont des mauvais désirs, ne s'expliquent-elles pas par cette jalousie ? Pour exprimer les mauvais desseins du cœur de Caïn, la Bible aime à dire que son présent n'était pas offert dans un vrai esprit fraternel. Un autre exemple est celui de la Tour de Babel. Les hommes établissent une fraternité sans référence paternelle, ce qui s'avère impossible et provoque l'écroulement de cette vaine architecture. Dans la Bible, la faiblesse de la nature humaine est toujours représentée par des luttes fratricides.    

En revanche, on admirera la solidarité du peuple hébreu lors de sa sortie d'Egypte et de sa traversée du désert. Les " fils d'Israël " triomphent des adversités de cette épreuve. Suivant la loi de Dieu, les Hébreux étaient tous liés par un lien charnel (ils descendaient d'Abraham) mais ils étaient surtout liés par un lien spirituel : ils adoraient tous le même Dieu. C'est la force d'une fraternité idéale où l'esprit réunit autant que le sang.
     
(1) Chez les Grecs et les Romains, seuls comptaient les dieux de la cité. La religion celtique, puis la religion chrétienne, apportent u e dimension morale aux relations humaines.    



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