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Numéro 14 - rive spirituelle - septembre 2008

Abbé Régis de Saint-Rémy, prêtre

Plein de sollicitude

Le bénévole est rempli de sollicitude. Il est attentionné envers les autres. Cette préoccupation l'oblige à réfléchir avant d'agir, afin d'obtenir un résultat. Etre sollicité n'est pas seulement répondre à une demande, c'est avoir quelque chose à donner, c'est effectuer une action physique au sens plein du terme. Se donner soi-même - s'investir dans le langage courant - nécessite de l'attention, un soin minutieux, une affection, parfois une inquiétude pour son " efficacité " personnelle.   


Toute sollicitation consiste à demander avec insistance une place, un poste, un besoin à une personne précise. Le bénévolat accorde à cette demande une valeur particulière. C'est pourquoi un bénévole sollicité anticipe souvent la demande, soucieux d'apporter sa pierre à la construction, à l'entretien ou à la réparation de l'édifice dans lequel habitent les hommes.   

Deux exemples issus du monde religieux, et même évangélique, illustrent bien le propos. Le premier est celui de la figure de Marthe, sœur de Marie et de Lazare auprès de qui le Christ aimait se reposer à Béthanie. Jésus lui reproche sa préoccupation inquiète - le mot latin est sollicitudo - cette inquiétude des choses matérielles. Elle se distingue alors de sa sœur Marie qui reste soucieuse des choses spirituelles seules. Cette interprétation du texte évangélique qui force à s'intéresser à la personne de sainte Marthe permet de comprendre pourquoi elle est devenue l'une des patronnes de la charité.   

Le second exemple est tiré de la parabole du Bon Pasteur. Le " Bon Pasteur " laisse son troupeau pour rechercher une seule brebis au milieu des épines. Comme elle reconnaît la voix du pasteur - cette voix qui signifie le Bien même - elle n'hésite pas à le suivre. Il pourra alors la rapporter sur ses épaules. Il est l'image du dévouement affectueux, celle d'un " père " qui aide les gens dans le besoin tout en respectant leur liberté. Cette belle parabole sera reprise par l'Eglise durant la période féodale quand elle instituera la fonction de curé, responsable de chaque paroisse de fidèles. Rappelons-nous que l'étymologie de " curé " est précisément le latin cura qui veut dire " soin ".   

Le contraire de la sollicitude, c'est l'indifférence. Il y a indifférence de cœur, lorsque l'intérêt " se tourne uniquement vers soi ", empêchant de voir celui des autres quand il est supérieur au sien. Cette tentation est trop réelle dans un monde où la satisfaction matérielle est souvent plus facile que la préoccupation du prochain. L'indifférence d'esprit suit les mêmes pentes glissantes : un aveuglement intérieur empêchant de sortir de nous-mêmes et déformant le jugement jusqu'à le limiter uniquement à notre personne.   

Le terme " sollicitude " disparaît peu à peu. Refléterait-il une qualité qui s'estompe ou que nos sociétés individualistes relègueraient aux oubliettes ? Ce mot un peu vieilli semble pourtant nous inviter à réfléchir sur le bénévolat et sur nous-mêmes.



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