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Numéro 10 - rive spirituelle - mai 2007

Abbé Régis de Saint-Rémy, prêtre

David contre Goliath

Convaincre les uns et les autres, exposer ses arguments, recommencer ses explications, voilà les obligations permanentes des responsables d'associations. Malgré de nombreuses oppositions, un saint Vincent de Paul créa dans la France du XVIIe siècle déchirée par la Fronde, les premiers orphelinats et hôpitaux gratuits. Une Mère Teresa n'a pas hésité à consacrer sa vie à proclamer, en Inde, la dignité de toute mort...   


Patience, endurance, résistance sont nécessaires à ceux qui veulent du bien. On admirera un Frédéric Ozanam, mort à quarante ans en 1853, après s'être dévoué à la morale et à la justice, indubitablement liées selon lui dans un contexte travaillé par les ruptures sociales. On admirera aussi cette lutte des syndicats qui mirent soixante-dix ans à se faire reconnaître, sous Napoléon III, alors que tout rassemblement ouvrier était interdit depuis la fameuse loi Le Chapelier de 1791...   

Tous étaient profondément convaincus. C'est la première conclusion que l'on peut en tirer : pour entreprendre une action il est nécessaire d'agir en connaissance de cause, c'est-à-dire observer et constater par soi-même. Cela sous-entend d'abord la liberté d'action dans un cadre législatif et administratif parfois difficile. A contrario, la pleine liberté des individus assurera la qualité du bénévolat, sachant que l'on donne avec son coeur avant de donner avec son porte-monnaie. Toute action sous-entend aussi la liberté de penser, dans une société " ultra-technicisée " où la manipulation individuelle ou collective est parfois inconsciente.   

Comme nous luttons contre des idées et non contre des hommes, il faut réfléchir avant d'agir, préparer toute action et en établir auparavant toutes les conséquences, même psychologiques. Un roi ne part pas en bataille avant d'avoir évalué l'adversaire, préparé ses troupes et calculé ses chances de gagner. Il s'agit par là de donner la meilleure efficacité à nos entreprises.   

Etablir nos acquis de façon durable relève de la vraie prudence. On donnera très justement au mot son sens plénier de préparation, d'organisation, de distribution des pouvoirs, d'esprit inventif, en y ajoutant la défiance envers soi-même, non comme autocritique destructive, mais comme conscience de ses propres faiblesses.   

Une bonne image est donnée par le peuple hébreu dans le désert se lançant à la conquête de la Terre Promise, " là où coulaient le lait et le miel ". Après une captivité de plusieurs siècles, les Hébreux s'en allèrent recevoir au Mont Sinaï les fameux Dix Commandements. Malgré l'épisode de l'adoration du Veau d'Or, ces lois étaient appelées à devenir leur référence suprême et la force de leur cohésion. Ils purent largement y méditer durant leur séjour de quarante ans au désert, avant de pouvoir pénétrer en Palestine. A peine arrivés, ils rencontrèrent encore sept rois ennemis, images des péchés capitaux et des faiblesses humaines dont les Hébreux durent se débarrasser avant d'arriver à leur fin... La suite de l'histoire montre qu'ils ne déposèrent jamais totalement les armes, nous faisant constater qu'il reste plus facile d'acquérir un bien que de le conserver...   

Le plus bel épisode fut sans doute celui du combat de David et de Goliath. Grâce à son adresse, le jeune Hébreu affronta seul le géant philistin et le tua avec sa fronde. Cette suprématie de la force intérieure s'est encore répétée il y a quelques années en Pologne. Le syndicat Solidarnosc, n'écoutant que lui-même, a vaincu le géant soviétique, sans autres armes que son courage et ses convictions.



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