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Numéro 40 - rive étudiante - mai 2021

Camille Salese, chargée de mission, Licence 3 en Information et Communication (Université Paris Censier), Nakany Traore, chargée de mission, maîtrise en droit international (Université Paris I Panthéon Sorbonne) & Master 2 Droit public (Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis)

L’information pour neutraliser la désinformation- l’espérance d’une relation sereine de jeunes citoyens avec les médias

La propagation virale de la désinformation, notamment depuis l’irruption de la pandémie, semblait laisser peu de place à l’espérance, tant la confiance envers les médias et les institutions publiques a souffert. Sur les réseaux sociaux, Facebook, Twitter, les fausses informations sur le virus se sont propagées à une allure alarmante. Il ne s’agissait pas seulement d’erreurs ou de canulars, ces fake-news étaient bel et bien produites dans une volonté de tromper les internautes. Bien souvent, ces nouvelles sensationnalistes, non vérifiées, et idéologiquement marquées sont motivées par des intérêts lucratifs. Il existe un véritable commerce d’influence sous-jacent à ces dérives du numérique.

Ce contexte rendait le projet Class (1) d’autant plus essentiel : mobiliser les jeunes à faire campagne pour défendre l’information juste et vérifiée. Cela semble être le seul moyen de préserver une relation productive entre citoyens et médias. C’est à l’institut Saint-Pierre de Brunoy, en Essonne, qu’une première expérimentation de ce projet a pu être réalisée en France. Treize collégiens, six filles et sept garçons, en classe de troisième « prépa métier », encadrés par leur équipe d’enseignants, ont donc reçu, pendant cinq jours, la formation que nous avions préparée, sur la désinformation et les bons usages du numérique. Nous les avons initiés aux aspects théoriques de la désinformation, aux dangers numériques et aux théories conspirationnistes en leur présentant des notions clefs et les enjeux majeurs. En parallèle, nous leur avons chaque jour proposé de découvrir un métier en lien avec ces problématiques, dans l’espoir de susciter des vocations. Nous vérifiions quotidiennement leur attention au travers de questionnaires, auxquels ils répondaient avec justesse et motivation. Chaque après-midi était en partie consacrée à des exercices pratiques afin qu’ils s’entraînent à la préparation de leur campagne de sensibilisation, objectif final de la formation. Nous les avons également encouragés à travailler sur leur présentation personnelle, afin de favoriser leur insertion professionnelle et leur expliquer la nécessité de protéger leur image en ligne.

Si nous avions toutes les deux étés bénévoles, nous n’avions encore jamais eu la responsabilité d’une semaine complète de formation. Cette expérience aurait pu être difficile, si les élèves n’avaient pas été si réceptifs. Certains ont adopté une attitude proactive, en prenant en charge les aspects techniques, notamment la projection de vidéos, le cadrage de la caméra, ainsi qu’en nous sollicitant lorsqu’ils avaient terminé un exercice ou qu’ils avaient besoin de conseils, nous donnant des indications en temps réel sur l’état de leur progression. Ils ont écouté avec attention nos explications, pris en considération nos conseils et recommandations, et effectué avec motivation les exercices demandés. Nous allons observer l’évolution de leurs compétences et l’intégration de leur savoir, mais nous formulons de très bons espoirs sur leur progression à venir.

Le défi d’encourager des jeunes à s’engager dans une campagne de sensibilisation bénévolement a été doublé par les conditions exceptionnelles qu’implique la crise sanitaire. Les considérations techniques ont parfois compliqué nos initiatives, et beaucoup complexifié le lien que nous pouvions créer avec les jeunes. Cependant, ils se sont pris au jeu, et ont activement participé à l’ensemble des sessions. La question de savoir si nous avons pu créer un lien suffisamment solide pour les inciter à pratiquer le bénévolat de façon régulière reste ouverte. Il est certain que leur rapport à l’information et au numérique s’est amélioré avec cette formation, et nous sommes très optimistes sur leur volonté d’appliquer et transmettre ces bonnes pratiques. Nous avons abordé une thématique qui les touche au quotidien, déterminante pour leur bien-qui peut être source de tourments. Nous avons bon espoir d’avoir influencé leurs pratiques et d’avoir affiné leur regard critique. A la fin de la semaine, nous pouvions déjà constater que certains avaient parfaitement intériorisé les notions, et se les réappropriaient.

Ce sont non seulement leurs compétences et leurs savoirs que nous espérions améliorer, mais également leurs valeurs. Dans un âge aussi charnière qu’est le leur, troublé par une époque si complexe, acquérir à la fois un esprit critique et un regard bienveillant sur ses homologues internautes est essentiel. Face au constat alarmant de la violence permanente sur les réseaux sociaux et de la diffusion des infox, les réactions des jeunes à cette formation ont constitué une véritable espérance pour la relation entre médias et citoyens.

(1) pour plus d'informations sur le projet CLASS- https://class-erasmus.blogspot.com/



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