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Numéro 41 - rive d'ailleurs- Francophonie - décembre 2021

dr Emmanuel Adjovi, Représentant régional de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) pour la Caraïbe et l’Amérique latine (REPCAL)

La solidarité, une valeur centrale de la Francophonie

Au fondement de la Francophonie se trouve la notion de solidarité, entendue comme «le sentiment qui pousse les hommes à s’accorder  une aide mutuelle ». Elle peut également signifier une dépendance mutuelle entre des personnes liées par des intérêts communs ; esprits de corps » (1). La Francophonie institutionnelle est née d’une volonté commune d’affronter les injustices de l’économie mondialisée et les épreuves de la guerre froide à la fin des années 1960.

Confrontés à ces défis de la scène internationale, les dirigeants de plusieurs pays nouvellement indépendants ou de nations en construction se sont interrogés sur la réponse à apporter. C’est dans cette recherche de solutions que le président sénégalais de l’époque Léopold Sédar Senghor et ses homologues Hamani Diori du Niger, Habib Bourguiba de la Tunisie ainsi que le Prince Norodom Sihanouk du Cambodge ont œuvré pour la création le 20 mars 1970 de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT).

Ces quatre pères fondateurs, venant de pays divers ont souhaité mettre le français au service de la solidarité, du développement et du rapprochement des pays. Leur vision était de mettre en œuvre une solidarité intercontinentale et multiculturelle cimentée par le partage de la langue française. Depuis lors, la solidarité est devenue une valeur cardinale de la Francophonie. Elle se conjugue avec la notion de partage. 

Ces valeurs humanistes de solidarité et de partage ont été réaffirmées par la Charte de la Francophonie qui a transformé en novembre 2005 l’ACCT en Organisation Internationale de la Francophonie (OIF). En effet, l’article premier de ladite Charte a clairement indiqué : « La Francophonie, consciente des liens que crée entre ses membres le partage de la langue française et des valeurs universelles, et souhaitant les utiliser au service de la paix, de la coopération, de la solidarité et du développement durable, a pour objectifs d’aider : à l’instauration et au développement de la démocratie, à la prévention, à la gestion et au règlement des conflits, et au soutien à l’État de droit et aux droits de l’Homme ; à l’intensification du dialogue des cultures et des civilisations ; au rapprochement des peuples par leur connaissance mutuelle ; au renforcement de leur solidarité par des actions de coopération multilatérale en vue de favoriser l’essor de leurs économies ; à la promotion de l’éducation et de la formation ».

Forts de cette valeur de solidarité, les programmes de coopération de la Francophonie sont dédiés prioritairement aux pays francophones en développement. Le sommet des chefs d’Etats et de gouvernement de la Francophonie tenue en octobre 2012 à Kinshasa a même érigé l’Afrique en une priorité de l’Organisation. Cet engagement est rappelé au Sommet de 2018 à Erevan (Arménie).

Pendant les crises politiques, économiques ou humanitaires qui peuvent affecter des pays membres, la Francophonie se préoccupe principalement du sort des populations auxquelles elle manifeste sa solidarité. Par exemple, lorsque qu’un pays est suspendu de l’OIF pour cause de coup d’Etat ou de régime non démocratique, les actions de coopération avec le gouvernement et tous les acteurs du pays sont aussi mis en suspens, sauf le déploiement des programmes qui profitent directement à la population.

En cas de catastrophes naturelles dans un pays, la Secrétaire générale de la Francophonie mobilise les Etats et gouvernement membres pour qu’ils fassent preuve de solidarité envers les populations meurtries. Dans le cadre des nominations ou des élections dans les organisations internationales, des Etats qui présentent des candidats sollicitent le soutien des membres de la Francophonie, au nom de la solidarité qui les unit.

Pour défendre leurs intérêts dans des organisations internationales comme l’Organisation des Nations Unies (ONU), l’Organisation mondiale du commerce (OMC), la Banque mondiale et le Fonds Monétaire International (FMI), des Etats et gouvernements membres de la Francophonie peuvent se regrouper sous le pavillon de leur appartenance à l’OIF pour parler d’une même voix ou pour soutenir tel ou tel pays.

La solidarité francophone reste donc agissante dans plusieurs domaines et sert de moteur d’action pour la Francophonie. Ses leaders ont certainement  écouté les sages conseils du vénérable écrivain malien Ahmadou Ba dans sa lettre dédiée à la jeunesse : «La génération du vingt-et-unième siècle connaîtra une fantastique rencontre de races et d’idées…Qu’ils le veuillent ou non, les hommes sont embarqués sur un même radeau : qu’un ouragan se lève, et tout le monde sera menacé à la fois. Ne vaut-il pas mieux essayer de se comprendre et de s’entraider mutuellement avant qu’il ne soit trop tard ? » (2)

 

(1)  Dictionnaire  Le petit Larousse, 2019, p. 1081

(2)  Amadou Hampâté Bâ, lettre à la jeunesse, in “Lettres ouvertes à la jeunesse – Concours Dialogue des générations” organisé par l’ACCT (Agence de Coopération Culturelle et Technique) pour l’année 1985, Année internationale de la Jeunesse”



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