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Numéro 13 - rive d'Italie - mai 2008

dr Renato Frisanco, directeur des Etudes, Fondation Feo-Fivol (Rome, Italie)

Bénévolat et confiance citoyenne *

En Italie, le bénévolat est devenu une composante structurelle du paysage social national, si l'on considère le nombre de personnes, qui s'impliquent à titre gratuit et solidaire (les deux conditions indispensables au bénévolat), et le nombre d'organisations bénévoles ou OdV (2).   


Les bénévoles,engagés à titre individuel ou par le bais d'une association, sont estimés en Italie à 4,3 millions (2) et représentent 8,5% de la population de plus de 14 ans. Les organisations bénévoles ont vu leur nombre augmenter. Dans la dernière enquête de 2006, elles étaient 30 000, soit une croissance de 15% par rapport à 2001. Cette tendance s'est accélérée grâce à la loi qui leur a donné un cadre national (3). Ce cadre juridique a eu le mérite de reconnaître la spécificité des organisations bénévoles mai aussi de valoriser la précieuse contribution des services et actions avec les institutions publiques.   

Plus d'un million de bénévolessont actifs dans les OdV et 80% de ces dernières sont inscrites au registre public prévu par la loi nationale. Les bénévoles sont plus ou moins actifs. Les profils sont très variés : donneurs de sang et d'organes (aussi affiliés à un organisme), religieux, jeunes du service civil national volontaire, sans oublier les donateurs -base sociale et le soutien économique indispensables à l'unité solidaire. Le nombre de personnes rémunérées à titres divers (dans 25% des OdV) est également en augmentation croissante.   

La tendance à la hausseest générale dans le bénévolat. Le total des recettes des organisations de bénévolat enregistrées est passé de 675 millions d'Euros en 1997 à 1 630 millions d'Euros en 2003 (donnés ISTAT). Les services offerts ont augmenté tout comme le nombre d'organisations prestataires et des usagers. Les bénéficiaires directs sont ainsi passés de 2,5 millions à 6,8 millions entre 1997 et 2003.   

Certaines spécificités italiennesse dessinent. Les OdV se développent à l'initiative de groupes autonomes de citoyens qui souhaitent réponde aux problèmes de leur communauté. La plupart du temps, elles concernent la qualité de vie des citoyens (environnement, culture et biens culturels, éducation permanente et protection civile) et n'ont aucune volonté idéologique de défendre une cause nationale. Il n'est pas rare qu'un groupe de moins de 10 bénévoles se mobilisent pour une cause sur des thèmes plus concrets (phénomène dit " moléculaire "), même si c'est sur la base d'associations à part entière (" petite tête avec un corps associatif ").   

Ces groupes autonomes travaillent en étroite collaboration avec les autorités publiques, sont enregistrées légalement, ils bénéficient donc d'une structure formelle. Elles remplissent des services d'aide de première intervention ou de base. On note qu'une part de plus en plus importante est devenue semi professionnelle (un quart du phénomène) c'est-à-dire composée à part égale de bénévoles et de personnel rémunéré. Ce service continu plus " lourd ", en particulier dans le domaine sanitaire, assure, du moins en partie, la bonne organisation des services sociaux.   

Meilleure coordination au sein des OdV,fonctionnement en réseau, mobilisation efficaces sur des projets, la communication des valeurs et des messages (le " dit " du bénévole) n'est plus du tout en vase clos. Les formes d'autoévaluation interne et les comptes-rendus internes se sont développés, par souci de répondre à un besoin de légitimité.   

Des difficultés persistent: faire face au turn-over régulier de leurs bénévoles et promouvoir la participation des jeunes en valorisant au mieux leurs motivations et leur expression. Le thème de la gratuité pose problème aux bénévoles. Ces questions sont d'ordre culturel ou identitaire. En effet, une partie des bénévoles considère que le bénévolat est à but non lucratif et d'utilité sociale et ne raisonne pas en termes de gratuité et de don. Le remboursement de frais, la rémunération de travaux pour garantir l'efficacité des organisations, la recherche d'une contrepartie (plus ou moins facultative) des prestations suscitent de plus en plus le débat. Signe d'un phénomène de transformation du bénévolat italien.   

Le bénévolat est un phénomène composite. Certains s'engagent par vocation dans des domaines d'intervention variés (Welfare ou autre). La base peut être associative ou non, la structure semi professionnelle ou entièrement bénévole, petite ou grande. Les ODV sont affiliées ou non à des fédérations nationales ou locales, isolées ou en réseau, confessionnelles ou à matrice composite, institutionnelle ou indépendante des autorités publiques.   

La modernisation nécessaire de l'Etat providenceamplifie les résonances de l'action bénévole. Tout change : les stratégies de promotion des bénévoles citoyens, les motivations de l'action pro-sociale. Quel est le rôle " politique " assigné au bénévole ? Peut-il être sujet de participation effective dans tous les domaines ? Les changements culturels et sociétaux induisent aujourd'hui une réflexion profonde sur le bénévolat italien.
 
 
 
*  rive traduite de l'Italien par Bénédicte Halba
(1) En italien Organizzazioni di Volontariato (OdV) soit littéralement " organisations de volontaires ". 
(2) Source : Institut national de Statistiques, ISTAT, Enquête de 2006. 
(3) Loi L. 266/'91.



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