← Retour

Numéro 19 - rive de Grèce - mai 2010

dr Giorgos Tsimouris, chercheur au Département d'anthropologie sociale (Université du Panteion, Athènes)

Immigration et travail bénévole en Grèce

La Grèce, traditionnelle terre d'émigration, est devenue un pays d'immigration ces vingt dernières années. La carence des politiques publiques dans ce domaine a créé une demande bénévole dans de nombreux secteurs. L'immigration se développe dans tous les pays du Sud de l'Europe. En Grèce, la proportion des immigrés dans la population totale du pays est importante. Mais la part des clandestins rend difficile une évaluation précise des immigrants. On peut estimer le nombre d'étrangers à 10% de la population grecque, environ 64% viennent des Balkans voisins et 55% d'Albanie.  

L'immigration est souvent associée à des expériences traumatisantes : l'immigré s'est séparé de sa famille et a perdu des êtres chers. Il connaît le chômage, des problèmes de communication liés à la langue et aux codes culturels des pays hôtes. Il lui est difficile d'accéder aux services publics. Des initiatives ont été prises par diverses institutions dans l'éducation ou la santé publique, mais ces politiques de prévention et de répression de l'immigration sont ambivalentes. Les services sociaux grecs sont inefficaces ce qui explique l'action de groupes de bénévoles et d'organisations dans de nombreux domaines d'activité. Ils interviennent à court terme, dans des situations d'urgence. L'action à long terme concerne l'intégration, point clé souvent abordé dans les forums nationaux et européens.  

L'éducation attire le plus grand nombre de bénévoles. La présence accrue d'élèves étrangers dans les écoles primaires et secondaires (10% des élèves), n'a pourtant modifié ni le contenu ni la vision ethnocentrique du système éducatif grec. Les 26 écoles interculturelles proposent également un enseignement traditionnel : les immigrants ne peuvent pas apprendre leur langue maternelle ! Les langues étrangères sont peu enseignées de manière générale. Les associations bénévoles ont donc organisé des classes qui ne s'adressent pas seulement aux enfants mais aussi aux adultes. L'apprentissage de la langue grecque est en effet le meilleur moyen de favoriser les contacts interculturels et d'intégrer les immigrants dans la société. Ce sont des professeurs spécialisés, des étudiants ainsi que d'autres professionnels qui enseignent la langue grecque aux divers groupes ethniques et linguistiques.  

Pour améliorer les conditions de vie dans le pays hôte, les bénévoles d'ONG ont développé de nombreuses actions qui facilitent l'accès aux services publics des immigrants et des réfugiés. Des informations sur les permis de séjour, leurs droits, et leur résidence en Grèce sont dispensés. Ils sont aussi aidés sur un plan médical et psychologique. Enfin, les bénévoles sont là pour tenter de résoudre les problèmes liés à l'emploi, à la loi et aux assurances.  

Des journaux et des festivals sont organisés par des militants bénévoles pour éveiller la conscience du public aux conditions de vie des immigrés et des réfugiés en Grèce. Ils essayent aussi de sensibiliser le public aux politiques d'immigration et ses causes et initient des structures de solidarité pour les immigrants et les réfugiés. Lutter contre le racisme ordinaire ou institutionnel est un autre exemple de leurs actions pour protéger les demandeurs d'asile.  

Beaucoup d'immigrants sont morts en essayant de traverser la mer Egée, c'est un sujet de combat pour les bénévoles engagés dans des ONG spécialisées dans la protection des droits des demandeurs d'asile. L'été dernier, les conditions inhumaines de détention d'immigrants clandestins sur l'île de Lesbos et sur les autres îles de la Mer Egée ont mobilisé toutes les énergies.  

La défense des femmes immigrées et la lutte contre les trafics humains, et contre la violence faite aux immigrants mobilisent d'autres groupes de bénévoles. Ils sont apparus surtout dans les grandes villes du pays, et travaillent comme médiateurs interculturels et groupes de soutien. Ils aident les immigrants à construire des réseaux et leur donnent les moyens de lutter pour leur survie dans le pays d'accueil.  

Impossible de dresser une carte détaillée du bénévolat en Grèce. Cependant, nous pouvons donner quelques critères des motivations de leur engagement. Les bénévoles souhaitent avant tout défendre un projet précis, comme les droits de l'homme, les droits civiques, la lutte contre le racisme ou l'exclusion sociale, le sexisme, le droit à l'éducation pour tous… Des bénévoles plus militants s'engagent dans des partis politiques. L'Eglise orthodoxe s'implique principalement dans des activités éducatives et philanthropiques. Malgré le petit nombre de pratiquants, les catholiques et les protestants de l'Eglise pentecôtiste développent des réseaux bénévoles pour participer à cette grande mobilisation nationale d'aide aux migrants.



devenez contributeur des rives d'iriv

← Retour